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06 mars 2016

 

  • Vier Letzte Lieder – Richard Strauss (1948)

 

Ce chef d’œuvre testamentaire pour orchestre et voix est composé par Richard Strauss un an avant sa mort en 1949. Le compositeur y rassemble tous les aspects de sa personnalité musicale : son amour pour la poésie, la voix soprano qu’il affectionne tant et un orchestre qui offre une large palette de sons et de possibilités. Les quatre Å“uvres sont conçues comme un cycle de vie et leur tempo lent rappelle la sérénité de l’âge. Si Richard Strauss ne définit pas d’ordre, son éditeur choisit celui d’un enchaînement temporel logique : Frühling (le printemps), September (septembre), Beim Schlafengehen (l’heure du sommeil) jusqu’à Im Abendrot (au crépuscule) qui clôt cette Å“uvre d’adieu par une fin inévitable : « Serait-ce déjà la mort ? Â».

 

  • Vieillir – Jacques Brel (1977)

 

A 30 ans déjà Jacques Brel chante la mort. Mises en scène de sa propre disparation, réflexions sur la fin de vie et l’au-delà… Brel était comme beaucoup d’artistes obsédé par la mort. Mais le chanteur n’a pas peur de mourir, et plus la fin approche plus il le montre. Lorsqu’on lui diagnostique un cancer du poumon en 1969, il déclare : Â« je n’ai pas peur de la mort, mais j’ai peur de ne plus être Â». Dans Vieillir, extrait de son dernier album, la mort n’est rien d’autre qu’une délivrance qu’il évoque avec des mots crus et francs. Accompagné par la simple mélodie d’une guitare, Brel se met à nu et fait face à la mort une dernière fois puisqu’il s’éteindra moins d’un an plus tard.

 

  • Redemption Song – Bob Marley (1980)

 

La dernière chanson enregistrée par Bob Marley est sans précédent et incomparable à tout ce qu’il a pu produire jusque-là : une ballade acoustique à la guitare, sans accompagnement et sans une once de rythme reggae. Alors que la vie du chanteur est sur le point de se terminer à cause d’un stupide cancer de l’orteil, sa chanson retrace le parcours d’une vie menée avec conviction et emprunte de valeurs fortes et d’envies de liberté et de rédemption. Redemption Song résonne certes comme une chanson d’adieu mais aussi et surtout comme une ode à la vie.

 

  • The Show Must Go On – Queen (1991)

 

Lorsque Freddie Mercury entre en studio pour enregistrer The Show Must Go On, il est au bout du rouleau, affaibli par la maladie et à peine capable de marcher. Un verre de vodka et un « I’ll fucking do it, darling Â» plus tard, le chanteur crache ses poumons et enregistre en une seule prise ce qui deviendra la chanson le plus mythique du groupe, un morceau aux rythmes répétitifs et aux mélodies oppressantes dégageant la puissance d’un cyclone émotionnel. Un bel au revoir de la part d’un homme mourant qui n’a jamais semblé aussi vivant.

 

  • C’est Plus Pareil – Mano Solo (1997)

 

Atteint du Sida depuis ses 23 ans, Mano Solo n’a jamais caché sa maladie, l’affichant publiquement, allant souvent jusqu’à la hurler aux oreilles du monde. Dans C’est Plus Pareil, qui n’est pas sa dernière chanson mais assurément l’une des plus représentatives de son combat contre la maladie, un ensemble à cordes accompagne sa voix rocailleuse pour un morceau tragique où la poésie et la sincérité brutale de Mano Solo montrent aussi son indéniable rage de vivre. « J'ai tellement parlé de la mort que j'ai cru la noyer, la submerger de ma vie, l'emmerder tant et tellement qu'elle abandonne l'idée même de m'emmener avec elle Â» : regarder la mort en face et lui cracher au visage, il ne faisait rien de mieux, cet écorché vif.

 

  • Hurt – Johnny Cash (2002)

 

Si Hurt est à l’origine une chanson de Nine Inch Nails, Johnny Cash s’en empare sept mois avant de rendre son dernier souffle et livre une interprétation déchirante qui, tout le monde s’accorde pour le dire, surpasse de loin l’originale. En plus du changement d’un vers, de « crown of shit Â» à « crown of thorns Â», le chanteur modifie aussi l’orchestration et choisit la sobriété : guitare folk, piano et voix. Sobre oui, mais très loin d’être fade. C’est une émotion brute et saisissante qui se dégage de la voix rauque et fatiguée d’un vieil homme qui lutte une dernière fois contre la mort et pour la musique.  

 

  • Stuck Inside a Cloud – George Harrison (2002)

 

Si George Harrison est emporté par un cancer de la gorge avant d’avoir pu finir d’enregistrer son dernier album, il n’en ressort pas moins le caractère très personnel des morceaux grâce à son fils Dhani qui finit d’enregistrer Brainwashed avec Jeff Lynne. Dans l’aérien Stuck Inside A Cloud, au son de sa slide guitare George Harrison nous fait part de ses réflexions sur le sens de la vie et semble vouloir faire discrètement ses adieux. Si les avis sont partagés concernant le véritable sens de la chanson, Dhani Harrison choisit Stuck Inside A Cloud pour occuper la septième place de Brainwashed, perpétuant la tradition de son père qui plaçait toujours son morceau préféré en septième position de ses albums. Un petit clin d’œil à Papa coincé dans son nuage ?

 

  • Keep Me in Your Heart - Warren Zevon (2003)

 

Rien de plus déchirant qu’une chanson d’adieu, surtout quand elle est directement destinée à un proche. Apprenant qu’il souffre d’un cancer du poumon en 2002, Warren Zevon décide d’utiliser le temps qu’il lui reste pour écrire cette chanson qu’il dédie à sa femme. En résulte un morceau plein d’émotion dans lequel le chanteur demande à sa femme de ne pas l’oublier en lui répétant « Keep me in your heart for a while Â», un refrain posé sur une mélodie folk et qui revient en boucle nous hanter par sa simplicité et sa force.

 

  • I’m Not Gonna Miss You – Glen Campbell (2014)

 

En 2011 lorsqu’il apprend qu’il est atteint de la maladie d’Alzheimer, Glen Campbell compose cette chanson dans un moment de lucidité. Une ballade pop folk simple et sincère dans laquelle il s’adresse à sa femme et lui déclare amoureusement : « You're the last person I will love, you're the last face I will recall, and best of all, I'm not gonna miss you ». La sincérité brutale des paroles ne renvoie qu’à la triste réalité, une réalité que Campbell oublie jour après jour mais qui se fait plus douce pour ses proches à l’écoute de cette bouleversante déclaration d’amour.

 

  • Lazarus – David Bowie (2015)

 

Se sachant condamné par un cancer du foie, David Bowie met toute sa force et son talent dans la réalisation de son dernier album Blackstar. La chanson Lazarus, composée pour la pièce de théâtre du même nom écrite avec l’écrivain irlandais Enda Walsh, est avant tout un combat contre la mort. Un son surnaturel et lointain en guise d’ouverture et déjà les paroles « Look up here I’m in heaven Â» résonnent, oppressantes. La guitare s’énerve, le saxophone entre en scène et envoie tout balader. Souffrance physique mise en musique, le morceau testament de Bowie prend aux tripes. Un véritable tour de force de l’artiste aux mille visages qui ne pouvait pas rejoindre les étoiles sans laisser une dernière trace de son passage sur terre.

La musique face à la mort

en 10 morceaux

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